Contentieux de l’urbanisme – Régularisation et refus
CE, 9 mars 2023, n°466405
Le refus opposé à une demande de permis de construire, présentée à la suite d’un jugement prononçant un sursis à statuer sur le fondement de l’article L.600-5-1 du code de l’urbanisme, doit être contesté dans le cadre d’une nouvelle instance. Cette instance doit être regardée comme dirigée contre le refus d’autoriser le projet dans son ensemble, y compris les modifications qu’il était envisagé d’y apporter. Par ailleurs, si aucune mesure de régularisation n’est notifiée au juge qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation d’urbanisme, décide de recourir à l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, il
appartient à celui-ci de prononcer l’annulation de l’autorisation litigieuse, sans que puisse être contestée devant lui la légalité du refus opposé, le cas échéant, à la demande de régularisation présentée par le
bénéficiaire de l’autorisation.
Contentieux de l’urbanisme – Notification d’une décision portant retrait
d’une décision retirant un permis de construire
CE, 1er février 2023, n° 461478
La décision retirant une décision de retrait de permis de construire prise à la demande d’un tiers, doit être notifiée au tiers qui avait demandé le retrait initial afin de faire courir à son égard le délai de recours
contentieux. Selon le Conseil d’Etat, le tiers ayant demandé initialement le retrait de l’autorisation de construire doit être regardé, tout comme le titulaire du permis de construire ainsi rétabli, comme le destinataire de la décision ayant initialement retiré le permis de construire.
Contentieux de l’urbanisme – Portée de la suspension d’un permis de
construire
CE, 20 juillet 2023, n° 467318 / CE, 9 novembre 2021, n° 441203
La décision du juge des référés prononçant la suspension d’un refus de permis de construire ainsi qu’une injonction à la commune de réexaminer la demande ne fait pas courir un délai de nature à faire naître une
autorisation tacite. Seule la confirmation de la demande réalisée par le pétitionnaire auprès de la commune permet de faire courir le délai d’instruction au terme duquel une autorisation tacite pourra être acquise. Il n’est pas nécessaire de procéder au dépôt d’une nouvelle demande, un courrier demandant la reprise de l’instruction en application de l’ordonnance du juge des référés peut valablement faire courir le délai d’instruction.
Contentieux administratif – Précisions sur le délai issu de la jurisprudence
Czabaj
CE, 16 juillet 2016, n° 387763 / CE, Avis, 12 juillet 2023, n° 474865
Le Conseil d’Etat a rendu un avis apportant des précisions sur le délai raisonnable d’un an issu de la
jurisprudence Czabaj. Dans cet avis rendu le 12 juillet 2023, le Conseil d’Etat précise que ce délai est interrompu par l’exercice d’un recours administratif, gracieux ou hiérarchique. Deux hypothèses peuvent alors se présenter :
• Soit le recours administratif fait l’objet d’une décision expresse de rejet. Si la notification de cette décision n’est pas assortie d’une mention sur les voies et délais de recours, un nouveau délai d’un an
court.
• Soit le recours administratif est implicitement rejeté en raison du silence gardé pendant deux mois par l’autorité administrative, un délai de droit commun de deux mois court dès la naissance d’une
décision implicite si l’administration a accusé réception du recours et que l’accusé de réception comportait les indications prévues à l’article R.112-5 du code des relations entre le public et
l’administration. A défaut d’accusé de réception de son recours, l’intéressé dispose d’un nouveau délai de recours contentieux d’un an.
Le Conseil d’Etat s’est également prononcé sur la conjugaison entre une demande d’aide juridictionnelle et le délai issu de la jurisprudence Czabaj.
Il a ainsi indiqué que lorsqu’une demande d’aide juridictionnelle est formée dans le délai raisonnable issu de la jurisprudence Czabaj, elle a pour effet d’interrompre le délai. Le délai de recours contentieux
recommence à courir à compter de l’expiration d’un délai de quinze jours après la notification de la décision se prononçant sur la demande d’aide juridictionnelle ou, si elle est plus tardive, à compter de la date de désignation de l’auxiliaire de justice au titre de l’aide juridictionnelle. S’agissant du délai alors applicable, il est de deux mois en cas d’admission à l’aide juridictionnelle. En cas de refus, le délai est celui ici de la jurisprudence Czabaj.
Contentieux de l’urbanisme – Modalités d’application de l’article
L.600-2 du code de l’urbanisme
CE, 13 novembre 2023, n° 466407
En application de l’article L.600-2 du code de l’urbanisme, lorsqu’un refus de permis a été annulé et que le pétitionnaire a confirmé sa demande dans le délai de 6 mois suivant la notification de la décision
juridictionnelle d’annulation, l’autorité compétente ne peut rejeter la demande dont elle se trouve ainsi ressaisie en se fondant sur des dispositions postérieures à la date du refus annulé.
Toutefois, le pétitionnaire ne peut bénéficier de façon définitive de ce mécanisme que si l’annulation juridictionnelle du refus est elle-même définitive ce qui suppose que la décision juridictionnelle prononçant
l’annulation soit devenue irrévocable. Le Conseil d’Etat juge que, dans le cas où l’autorité administrative a délivré le permis sollicité sur le fondement de l’article L.600-2, elle peut retirer cette décision si le jugement ou l’arrêt prononçant l’annulation du refus est annulé, sous réserve que les motifs de la nouvelle décision juridictionnelle ne fassent pas par eux-mêmes obstacle à un autre refus. Ce retrait peut intervenir dans un délai de trois mois à compter de la notification à l’administration de la nouvelle décision juridictionnelle et l’administration doit préalablement inviter le pétitionnaire à présenter ses observations.
Contentieux de l’urbanisme – Annulation d’une décision de sursis à
statuer
CE, 13 novembre 2023, n° 466407
Lorsque le juge annule un refus d’autorisation ou une décision de sursis à statuer, après avoir censuré l’ensemble des motifs que l’autorité compétente a énoncés dans sa décision conformément aux
prescriptions de l’article L.424-3 du code de l’urbanisme ainsi que, le cas échéant, les motifs qu’elle a pu invoquer en cours d’instance, il doit, s’il est saisi de conclusions à fin d’injonction, ordonner à l’autorité
compétente de délivrer l’autorisation. Il n’en va autrement que s’il résulte de l’instruction soit que les dispositions en vigueur à la date de la décision annulée, qui eu égard aux dispositions de l’article L.600-
2 demeurent applicables à la demande, interdisent de l’accueillir pour un motif que l’administration n’a pas relevé, ou que par suite d’un changement de circonstances, la situation de fait existant à la date du
jugement y fait obstacle. Dès lors, lorsqu’il annule une décision de sursis à statuer sur une demande d’autorisation, le juge saisi de conclusions en ce sens doit également enjoindre à l’autorité compétente de délivrer l’autorisation sollicitée.
Contentieux de l’urbanisme – Consistance d’une mesure de régularisation
CE, 4 mai 2023, n° 464702
La seule circonstance que le vice dont est affectée l’autorisation contestée et qui a justifié le prononcé d’un sursis à statuer résulte de la méconnaissance d’une règle d’urbanisme qui n’est plus applicable à la date à
laquelle le juge statue de nouveau, à la suite de la modification du plan local d’urbanisme, ne constitue pas une « mesure de régularisation » au sens des articles L.600-5-1 et L.600-5-2 à défaut d’être entérinée par
un permis de construire modificatif.
Contentieux de l’urbanisme – Absence de régularisation possible pour
un permis frauduleux
CE, 11 mars 2024, n° 464257
Les dispositions de l’article L.600-5-1 du code de l’urbanisme ne peuvent être mises en œuvre pour la régularisation d’une autorisation d’urbanisme obtenue par fraude.
Contentieux de l’urbanisme – Permis délivré au visa d’un PLU abrogé
CE, 31 mai 2024, n° 467427
Le Conseil d’Etat était saisi un permis d’aménager délivré au visa du plan local d’urbanisme communal alors qu’à cette date, le plan local d’urbanisme intercommunal était entré en vigueur et avait abrogé le plan
local d’urbanisme communal. Il juge que la circonstance qu’un permis ait été au visa d’un document d’urbanisme abrogé n’entraîne pas son illégalité. Il appartient à l’auteur du recours de démontrer que cette autorisation méconnaît les dispositions d’urbanisme en vigueur à la date de sa délivrance.
Autorisation de construire et règles de procédure – Contestation de la
majoration du délai d’instruction de la demande
CE, section, 9 décembre 2022, n° 454521 / CE, 24 octobre 2023, n° 462511
Dans un arrêt récent, le Conseil d’Etat avait jugé que le délai d’instruction des autorisations d’urbanisme n’était ni interrompu, ni modifié par une demande illégale tendant à compléter le dossier par une pièce non
exigible. Une telle demande ne fait donc pas obstacle à la naissance d’une autorisation tacite. Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat étend cette jurisprudence aux majorations du délai d’instruction. Ainsi, il
juge qu’une modification du délai d’instruction notifiée après le délai d’un mois prévu à l’article R.423-18 du code ou qui ne serait pas motivée par l’une des hypothèses de majoration prévues aux articles R.423-
24 à R.423-33 du code, n’a pas pour effet de modifier le délai d’instruction de droit commun à l’issue duquel naît une décision tacite. Par ailleurs, s’il appartient à l’autorité compétente, le cas échéant, d’établir
qu’elle a procédé à la consultation ou mis en œuvre la procédure ayant motivé la prolongation du délai d’instruction, le bien-fondé de cette prolongation est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.
Dès lors, dans la mesure où la décision de refus ne trouve pas sa base légale dans la décision de majoration du délai d’instruction et n’est pas prise pour son application, le requérant ne peut invoquer son illégalité à
l’occasion du recours contre l’arrêté de refus de permis de construire. La décision de majoration ne fait pas grief et ne peut pas faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir.
Enfin, le bien-fondé de la prolongation du délai d’instruction est, par lui-même, sans incidence sur la légalité de la décision de refus de permis de construire.
Autorisation de construire et règles de procédure – Procédures
applicables pour les antennes relais
CE, Avis, 21 mars 2024, n° 490536
En application de l’article R.421-9 du code de l’urbanisme, doivent être précédées d’une déclaration
préalable :
c) Les constructions répondant aux critères cumulatifs suivants :
• une hauteur au-dessus du sol supérieure à douze mètres ;
• une emprise au sol inférieure ou égale à cinq mètres carrés ;
• une surface de plancher inférieure ou égale à cinq mètres carrés.
j) Les antennes-relais de radiotéléphonie mobile et leurs systèmes d’accroche, quelle que soit leur hauteur, et les locaux ou installations techniques nécessaires à leur fonctionnement dès lors que ces locaux ou
installations techniques ont une surface de plancher et une emprise au sol supérieures à 5 m2 et inférieures ou égales à 20 m2.
Selon un avis rendu par le Conseil d’Etat, ces dispositions doivent être lues comme soumettant à la procédure de déclaration préalable la construction d’antennes-relais de radiotéléphonie mobile, de
leurs systèmes d’accroche, et des locaux ou installations techniques nécessaires à leur fonctionnement lorsque soit, quelle que soit la hauteur de l’antenne, la surface de plancher et l’emprise au sol créées sont
supérieures à 5 m² et inférieure ou égale à 20 m², soit s’agissant des antennes d’une hauteur supérieure à 12 m, la surface de plancher et l’emprise au sol créées sont inférieures ou égales à 5 m². Les projets
comportant des antennes d’une hauteur inférieure ou égale à 12 m et entraînant la création d’une surface de plancher et d’une emprise au sol inférieures ou égales à 5 m² restent dispensées de toute formalités en
application des dispositions de l’article R.421-2.
Pour l’appréciation de ces seuils, seules la surface de plancher et l’emprise au sol des locaux et installations techniques doivent être prises en compte, et non l’emprise au sol des pylônes.
Autorisation de construire et règles de procédure – Procédure
contradictoire préalable au retrait d’une autorisation
CE, 12 juin 2023, n° 465241
Lorsqu’un bénéficiaire d’une autorisation de construire n’a pas pu présenter les observations orales qu’il avait pourtant sollicitées avant le retrait de cette autorisation, la décision de retrait est entachée
d’illégalité.
La circonstance que le bénéficiaire a pu produire des observations écrites ne permet pas de neutraliser cette irrégularité sur le fondement de la jurisprudence Danthony.
Autorisation de construire et règles de procédure – Un refus de permis
de construire (ainsi qu’une décision opposant un sursis à statuer ou
s’opposant à une déclaration préalable) est réputé notifié à la date de la
première présentation du courrier
CE, 24 mai 2024, n° 472321
Conformément à l’article R.424-10 du code de l’urbanisme, la décision portant refus de permis (ouopposant un sursis à statuer ou s’opposant à une déclaration préalable) doit être notifiée par LRAR au pétitionnaire.
L’article R.423-47, applicable aux courriers de notification de la liste des pièces manquantes et des modifications de délai, prévoit que l’intéressé est réputé avoir reçu notification de la lettre recommandée
à la date de la première présentation du courrier.
Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat juge que ces dispositions s’appliquent également aux décisions refusant le permis ou s’opposant à une DP, ainsi qu’à celles opposant un sursis à statuer.
Dès lors, l’intéressé est réputé en avoir reçu notification à la date de la première présentation du courrier.
Il ajoute que c’est à l’administration d’établir la date à laquelle le pli portant notification de sa décision a régulièrement fait l’objet d’une première présentation à l’adresse de l’intéressé
Règles de fond – Permis de construire et article R.111-2 du code de
l’urbanisme
CE, 1er mars 2023, n° 455629
Les inconvénients importants pour les conditions et le cadre de vie des riverains sont des considérations relatives à la commodité du voisinage qui ne relèvent pas de la salubrité publique au sens de l’article R.111-
2 du code de l’urbanisme.
Ainsi, la saturation du paysage qui résulterait d’un projet éolien ne constitue pas une atteinte à la salubrité publique.
Règles de fond – Notion d’extension d’une construction existante
CE, 9 novembre 2023, n° 469300
Lorsque le règlement d’un plan local d’urbanisme ne précise pas, comme il lui est loisible de le faire, si la notion d’extension d’une construction existante, lorsqu’il s’y réfère, comporte une limitation quant
aux dimensions d’une telle extension, celle-ci doit, en principe, s’entendre d’un agrandissement de la construction existante présentant, outre un lien physique et fonctionnel avec elle, des dimensions
inférieures à celle-ci.
Règles de fond – Opposabilité d’un cahier de recommandations
architecturales annexé au PLU
CE, 2 juin 2023, n° 461645
Le règlement du PLU peut renvoyer à un cahier de recommandations architecturales adopté selon les mêmes modalités procédurales, le soin d’expliciter ou de préciser certaines des règles figurant
dans le règlement auquel il s’incorpore. Un tel document ne peut toutefois être opposé aux demandes d’autorisation d’urbanisme que s’il y est fait expressément référence dans le règlement et que ce cahier
se contente d’expliciter ou préciser, sans les contredire ni les méconnaître, des règles figurant déjà dans le règlement.
Règles de fond – Notion d’agglomération ou village existants au sens de
la loi Littoral
CE, 12 juin 2023, n° 459918
La nature de l’opération foncière ayant autorisé la création d’un secteur urbanisé est sans incidence pour apprécier le caractère d’agglomération ou de village existant au sens de l’article L.121-8 du code de
l’urbanisme. Commet ainsi une erreur de droit, la cour administrative qui juge qu’un lotissement ne peut caractériser une agglomération ou un village existant.
Règles de fond – Loi littoral et agrandissement des constructions
existantes
CE, 3 avril 2020, n° 419139 / CE, avis du 30 avril 2024, n° 490405
Depuis 2020, la jurisprudence juge qu’un simple agrandissement d’une construction existante n’est pas prohibé par le principe de l’urbanisation en continuité avec les zones déjà urbanisées.
Dans un avis rendu le 30 avril 2024, le Conseil d’Etat vient préciser la notion de « simple agrandissement » d’une construction existante.
Ainsi, une extension présentant un caractère limité au regard de sa taille propre, de sa proportion par rapport à la construction et de la nature de la modification apportée, ne peut être regardé comme une
extension de l’urbanisation prohibée par les dispositions de l’article L.121-8 du code de l’urbanisme. Il ajoute que le caractère de l’agrandissement envisagé s’apprécie, pour les constructions postérieures à la
loi littoral du 3 janvier 1986, par comparaison avec l’état de la construction initiale, sans qu’il y ait lieu de tenir compte des éventuels agrandissements intervenus ultérieurement. S’agissant des constructions antérieures à la loi du 3 janvier 1986, le caractère de l’agrandissement envisagé s’apprécie par comparaison avec l’état de la construction à la date d’entrée en vigueur de cette loi
Règles de fond – Demande d’autorisation de construire sur un
emplacement réservé
CE, 19 juillet 2023, n° 456409
Lorsqu’un emplacement réservé est inscrit au PLU, l’autorité compétente est tenue de refuser toute demande, même émanant de la personne bénéficiaire de la réserve, dont l’objet ne serait pas conforme à la
destination de l’emplacement réservé, tant qu’aucune modification du PLU emportant changement de la destination n’est intervenue. En revanche, un permis de construire portant à la fois sur l’opération en vue
de laquelle l’emplacement a été réservé et sur un autre projet peut être légalement délivré, dès lors que ce dernier projet est compatible avec la destination assignée à l’emplacement réservé.
Plan local d’urbanisme – Les carrières peuvent être autorisées en zone
agricole
CE, 29 mai 2024, n° 461648
Les dispositions du code de l’urbanisme ne font pas obstacle à la délimitation, par les auteurs du PLU, de secteurs au sein des zones agricoles dans lesquels les constructions et installations nécessaires à la mise
en valeur des ressources du sol et du sous-sol sont autorisées.
Urbanisme commercial – Surface à prendre en compte pour la soumission
d’un projet de drive à autorisation d’exploitation commerciale
CE, 14 mai 2024, n° 469687
La surface à prendre en compte est celle des prises de ravitaillement et des zones, bâties ou non bâties, dans lesquelles la clientèle est susceptible de se rendre à pied pour retirer ses achats au détail commandés
par voie électronique, sans qu’il y ait lieu de distinguer entre les drives selon qu’ils sont ou non intégrés à un magasin de commerce de détail.
Contentieux pénal de l’urbanisme – Un changement d’affectation d’un
bâtiment peut constituer une infraction pénale
Cour de cassation, 27 février 2024, n° 23-82.639
Le fait d’affecter à une utilisation contraire aux dispositions d’un plan local d’urbanisme des constructions régulièrement édifiées en vue d’une autre affectation constitue une violation du PLU et le délit prévu à
l’article L.610-1 du code de l’urbanisme.
Contentieux pénal de l’urbanisme – La transformation progressive d’un
bâtiment destiné à stocker et conditionner les crustacés en une activité
de poissonnerie et restauration constitue une infraction pénale
Cour de Cassation, chambre criminelle, 6 février 2024, n° 23-81.748
La Cour de cassation confirme la condamnation pour méconnaissance du PLU des propriétaires exploitants d’un bâtiment de stockage et conditionnement de crustacés devenu progressivement une poissonnerie
avec une grande terrasse extérieure et un restaurant. Elle valide également la mesure ordonnant la mise en conformité des lieux.
Droit de préemption – Transposition de la jurisprudence applicable
en matière de droit de préemption urbain au droit de préemption
commercial prévu à l’article L.214-1 du code de l’urbanisme
CE,15 décembre 2023, n° 470167
Les collectivités titulaires du droit de préemption visé à l’article L 214-1 du code de l’urbanisme peuvent légalement exercer ce droit :
• d’une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l’exercent, de la réalité d’un projet d’action ou d’opération d’aménagement répondant aux objets mentionnés à l’article L. 300-1 du code de
l’urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n’auraient pas été définies à cette date,
• d’autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption. En outre, la mise en œuvre de ce droit, eu égard notamment aux caractéristiques du bien, en l’occurrence
le fonds artisanal ou commercial ou le bail commercial, faisant l’objet de l’opération ou au coût prévisible de cette dernière, doit répondre à un intérêt général suffisant.
Droit de préemption – Pas de nouvelle DIA pour une vente conclue au
même prix et dans les mêmes conditions à une autre acquéreur
CE, 29 mai 2024, n° 489337
Dans la mesure où la mention de l’acquéreur n’est pas une mention obligatoire de la DIA, lorsqu’un propriétaire conclut une nouvelle promesse de vente pour un bien, au même prix et dans les mêmes
conditions qu’une précédente promesse pour laquelle les acquéreurs ont renoncé, il n’y a pas lieu de renouveler la DIA.
Expropriation – Pas d’indemnisation pour une construction illégale sur
un terrain inconstructible
Cour de Cassation, chambre civile 3, 15 février 2024, n° 22.16-460
Faute pour le propriétaire de pouvoir invoquer un droit juridiquement protégé au jour de l’expropriation, la dépossession d’une construction édifiée irrégulièrement et située sur une parcelle inconstructible, n’ouvre
pas droit à indemnisation, même si toute action en démolition est prescrite à la date de l’expropriation.
Éolien – Appréciation du phénomène de saturation visuelle
CE, 10 novembre 2023, n° 459079
La circonstance que les intérêts mentionnés à l’article L. 511-1 du code de l’environnement incluent la protection des paysages ne fait pas obstacle à ce que l’impact visuel d’un projet, en particulier le phénomène
de saturation visuelle qu’il est susceptible de produire, puisse être pris en compte pour apprécier ses inconvénients pour la commodité du voisinage au sens de cet article.
Il appartient au juge de plein contentieux, pour apprécier les inconvénients pour la commodité du voisinage liés à l’effet de saturation visuelle causé par un projet de parc éolien, de tenir compte, lorsqu’une telle
argumentation est soulevée devant lui, de l’effet d’encerclement résultant du projet en évaluant, au regard de l’ensemble des parcs installés ou autorisés et de la configuration particulière des lieux, notamment en
termes de reliefs et d’écrans visuels, l’incidence du projet sur les angles d’occupation et de respiration, ce dernier s’entendant du plus grand angle continu sans éolienne depuis les points de vue pertinents.
La circonstance que les éoliennes ne seraient pas toutes simultanément visibles depuis un même point n’est pas, par elle-même, de nature à permettre d’écarter l’existence d’un effet de saturation.
Éolien – Application des règles de hauteur du PLU aux projets d’éoliennes
terrestres
CE, 14 juin 2018, n°409227 / CE, 18 décembre 2023, n° 459339
Les projets d’éoliennes terrestres sont soumis à une autorisation environnementale et dispensés de permis de construire en application de l’article R.425-29-2 du code de l’urbanisme. Il n’en demeure pas moins que
les règles d’urbanisme du PLU leur sont opposables.
Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat rappelle ainsi que les projets d’installations éoliennes terrestres soumis, depuis le 1er mars 2017, à autorisation environnementale sont dispensés de l’obtention d’un permis de
construire ce qui n’a, toutefois, ni pour objet ni pour effet de dispenser de tels projets du respect des règles d’urbanisme qui leurs sont applicables, les dispositions de l’article D.181-15-2 du code de l’environnement
mettant à la charge de l’autorité administrative, à l’occasion de l’instruction de la demande d’autorisation environnementale, l’examen de la conformité des projets d’installation d’éoliennes aux documents
d’urbanisme applicables.
Il ajoute que sont ainsi opposables à ces projets les prescriptions du plan local d’urbanisme et notamment celles relatives à la hauteur des constructions et installations.
Évaluation environnementale – Régularisation de l’autorisation en cas
d’insuffisance de l’étude d’impact
CE, 1er mars 2023, n° 458933
Dans un arrêt rendu le 1er mars 2023, le Conseil d’Etat juge que « les inexactitudes, omissions ou insuffisances d’une étude d’impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d’entraîner l’illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l’information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l’autorité administrative. »
Dès lors, le juge doit, au moment de décider de la nécessité d’une mesure de régularisation, « rechercher au préalable si les insuffisances constatées avaient eu pour effet de nuire à l’information complète de la
population ou été de nature à exercer une influence sur la décision de l’autorité administrative et donc à entraîner l’illégalité de la décision prise. »
Évaluation environnementale – Contenu de l’étude d’impact –
Les incidences susceptibles d’être provoquées par l’utilisation et
l’exploitation du projet doivent être analysées dans l’étude d’impact.
CE, 27 mars 2023, n° 450135
Conformément à l’article R.512-8, les effets sur l’environnement d’un projet d’installation classée qui doivent faire l’objet d’une analyse spécifique dans l’étude d’impact doivent être déterminés au regard de
la nature de l’installation projetée, de son emplacement et ses incidences prévisibles sur l’environnement. L’appréciation de ces effets suppose que soient analysées dans l’étude, non seulement les incidences
directes sur l’environnement mais aussi celles susceptibles doivent être provoquées par son utilisation et son exploitation. Cette analyse doit être en relation avec l’importance de l’installation projetée.
L’étude d’impact d’une centrale biomasse doit analyser les effets sur l’environnement de son plan d’approvisionnement en bois.
Pierre-Etienne BODART
Avocat associée
[1] Ordonnance du 8 février 2023 relative à l’exercice en société des professions réglementées, prise sur habilitation de la loi du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante, en vigueur le 1erseptembre 2024
[2] Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 19 octobre 2023, 21-20.366, Publié au bulletin