Selon l’article L48-2 du code électoral « Il est interdit à tout candidat de porter à la connaissance du public un élément nouveau de polémique électorale à un moment tel que ses adversaires n’aient pas la possibilité d’y répondre utilement avant la fin de la campagne électorale. »
Le législateur souhaite ce faisant assurer les conditions d’une campagne électorale garantissant un débat contradictoire entre les différents candidats, ce qui impose qu’un temps utile soit offert pour prendre connaissance et le cas échéant répliquer à un argument diffusé ou une polémique électorale orchestrée par un adversaire.
La Haute Juridiction Administrative a déjà en conséquence pu voir dans la diffusion tardive d’un tract, une atteinte à la sincérité du scrutin dès lors que la diffusion tardive a pour objet ou pour effet de placer les adversaires, dans l’impossibilité de répliquer à cet écrit, en temps utiles (CE 17 avril 2015, n°385764. Voir également dans le même sens, pour une diffusion d’un tract entre 17H et 23H, le vendredi précédant l’élection, CE 25 février 2015, n°385686).
Il en va ainsi d’autant plus lorsqu’un très faible écart de voie sépare les candidats (TA Versailles, 27 juin 2014 n° 1402500)
Le Conseil d’Etat retient par exemple l’atteinte à la sincérité du scrutin pour une diffusion tardive d’un tract, en cas de faible écart de voix (Par exemple un écart de 18 voix sur 360 suffrages exprimés, CE 7 janvier 2015, n°383314).
En revanche, lorsque des éléments de polémique électorale sont diffusés tardivement, mais avaient déjà été amplement débattus précédemment, à plus fortes raisons, lorsqu’il s’agit de thèmes phares de la campagne électorale, alors la diffusion tardive d’un tract n’est pas suffisante à faire regarder cette diffusion tardive comme de nature à entacher la sincérité du scrutin :
« Par ailleurs, si la liste « Chamrousse ensemble » a proposé sur son site internet, le 26 juin 2020 soit deux jours avant le second tour de scrutin, de communiquer aux électeurs qui en feraient la demande de nouvelles informations relatives à l’investisseur pressenti du projet de développement touristique « Chamrousse 2020-2030 », ce projet a constitué l’un des thème majeurs du débat électoral préalable au second tour des élections municipales et cet élément de polémique électorale s’inscrivait dans le prolongement d’échanges nourris entre les listes. Ainsi, la liste « Pour Chamrousse » a annoncé le 19 juin 2020 que » le grand projet de rénovation urbaine Chamrousse 2020-2030 [avait] décroch[é] un nouvel investisseur « , avant que ne réplique la liste » Chamrousse ensemble « , les 20 et 23 juin 2020, en s’interrogeant sur les capacités réelles de cet investisseur, et que la liste » Pour Chamrousse « , le 23 juin 2020, précise l’identité de cet investisseur. Ainsi, dans les circonstances de l’espèce, cet élément de polémique électorale ne peut davantage être regardé comme présentant un caractère nouveau au sens de l’article L. 48-2 du code électoral. » (Conseil d’Etat, 29 décembre 2020, n° 445708)